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Les conditions de réduction ou d'exclusion de la réparation du préjudice du conducteur fautif

par Pierre Donguy le 12/04/2022

A l'inverse des non-conducteurs, dont la réduction ou l'exclusion du préjudice ne peut résulter que d'une faute volontaire d'une exceptionnelle gravité, le conducteur victime d'un accident de la circulation peut se voir opposer de simples fautes pour diminuer son droit à indemnisation. La Cour de Cassation en a réaffirmé, par un arrêt du 10 février 2022, les conditions.


La loi du 5 juillet 1985, dite " loi Badinter " encadre les conséquences indemnitaires des accidents de la circulation.

Elle régit notamment, à son article 4, les conditions de la limitation ou de l'exclusion de la réparation du préjudice de la victime conductrice fautive :

La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis."

 

  • La nécessaire démonstration d’un lien de causalité entre la faute et le dommage

Conformément à une interprétation littérale du texte précité, la Cour de Cassation affirme, depuis un arrêt de principe du 28 mars 1997 (Cass. ch. mixte, 28 mars 1997, n°93-11.078) que la faute du conducteur victime ne peut entrainer une limitation de son indemnisation que s'il est démontré un lien de causalité entre cette faute et le dommage.

Aussi, l'existence, dans l'absolu, d'un comportement fautif de la part du conducteur victime est inopérante, si la faute n'a eu aucune conséquence sur son dommage. 

De la même façon, il importe peu que la faute présente un lien de causalité avec l'accident en lui-même, seule la causalité avec la survenance du dommage devant être recherchée.

 

  • L'absence de prise en compte du comportement des autres conducteurs

A l'occasion de son arrêt du 10 février 2022 (Civ.2e, 10 fevr 2022, n°20-18.547), la Cour de Cassation a rappelé que l'analyse de la faute du conducteur victime doit être réalisée en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs, notamment dans la survenance de l'accident.

En l'espèce, les demandeurs au pourvoi critiquaient l'arrêt de la Cour d'Appel de Versailles qui avait fait référence au positionnement sur la route d'un conducteur tiers. 

Néanmoins, comme le rappelle la Cour de Cassation, cette mention n'avait pour but que de contextualiser l'accident et de déterminer la position de la victime conductrice.

Tout en faisant abstraction du comportement du véhicule tiers dans l'analyse de la faute de la victime, la Cour de Cassation rappelle ainsi qu'il demeure possible de se référer à des circonstances extérieures pour pouvoir apprécier la faute de la victime en lien avec son dommage.

Ces circonstances extérieures doivent toutefois seulement permettre de révéler des faits en lien avec la faute de la victime et son dommage et non être appréhendées pour justifier la survenance de l’accident.